jeudi 20 novembre 2008

Astrolabe 6



Récapitulatif de tous les tracés sur un même dessin de la mère et du tympan.


L'Araignée

1) D'abord une projection stéréographique de la voûte céleste avec la position d'étoiles connues. Comme les matériaux transparents n'étaient pas connus à l'époque de la fabrication des astrolables il fallut trouver une autre solution. Cette solution c'est cette grille de métal ajourée où chaque pointe correspond à la position d'un astre. Comme cette position varie au cours de l'année, l'araignée peut tourner autour de l'axe central pour positionner les étoiles correctement sur leurs coordonnées données par le tympan.
2) Ensuite une projection stéréographique de l'écliptique (trajet du soleil). C'est ce cercle excentré par rapport à l'axe central et qui est gravé des positions du Soleil dans le zodiaque.
On trouve en haut de l'araignée un picot qui dépasse (voir photos) et qui pointe sur le limbe la position du point vernal (endroit sur l'écliptique où se trouve le Soleil le jour de l'équinoxe de printemps).
Astrolabe et mesure du temps
Nous avons vu que l'astrolable peut être utilisé dans de multiples circonstances. En ce qui nous concerne, regardons rapidement comment il peut mesure le temps, en l'occurrence les heures.
Nous avons vu dans la partie II de cette étude qu'azimut et hauteur varient tous deux en permanence en dépendant de la latitude du lieu, de la déclinaison du soleil (date) et de l'heure. Nous avons donc trois paramètres : hauteur, jour, heure. Si nous connaissons deux de ces paramètres nous pouvons trouver le troisième. C'est le principe de calcul de l'heure avec un astrolabe.
Prenons un exemple : Nous voulons connaître l'heure d'un jour précis à un moment précis.
Nous allons, à l'aide de l'alidade trouver la hauteur du Soleil à ce moment précis. Nous connaissons le jour soit grâce à une table de conversion date-zodiaque soit directement. Repérons ce jour sur le cercle écliptique de l'araignée et, en la tournant, positionnons ce repère sur l'almucantarat correspondant à la hauteur du Soleil trouvée dans la première étape. Alignons maintenant l'ostensoir sur le jour et lisons l'heure directement sur le limbe. Facile, non ?
Sans ostensoir (astrolabes arabes) , il fallait passer par une étape intermédiaire qui était une mesure à partir de l'index de l'araignée.
Quant aux heures de nuit, le principe était le même en utilisant une étoile connue sur l'araignée de l'astrolable au lieu du Soleil.

Astrolabe 5

Ensuite, une projection stéréographique de la sphère locale telle que la voit un observateur placé à une latitude particulière. Cette projection variant justement en fonction de la latitude nous savons maintenant pourquoi il faut changer de tympan quand on se déplace le long d'un méridien. Les tympans portent une gravure de la latitude pour laquelle ils sont conçus.

Sphère locale : lignes de hauteur ou almucantarats :










Tous ces almucantarats sont gravés en degrés. Il y a une ligne tous les 2, 3 ou 5 degrés. Les almucantarats étant situés en haut de l'astrolabe tenu verticalement, on remarquera que les points cardinaux sont inversés : sud en haut, nord en bas, est à gauche et ouest à droite. Tous les almucantarats sont des cercles comme le prévoit la projection stéréographique mais certains sont tronqués du fait des dimensions limitées du tympan.

Sphère locale : lignes d'égal azimut



Astrolabe 4

La mère

A tout seigneur tout honneur. La mère peut être considérée comme le socle de l'instrument. C'est une plaque de métal ou de bois d'une dizaine de centimètres ou plus, légèrement creusée pour recevoir différents tympans qui devront être intervertis par l'observateur en fonction du lieu où il se trouve. Nous y reviendrons. Bien entendu, un seul tympan (le bon) sera utilisé. Selon les astrolabes (occidental ou arabe), la bordure de la mère (limbe) est gravée en degrés et/ou en heures. Ces heures sont au nombre de 24. Du haut en bas sur la partie droite pour les heures de l'après-midi et de haut en bas sur la partie droite pour les heures du matin.
L'instrument étant destiné à être utilisé verticalement pour les mesures de hauteur des astres (étoiles ou soleil), il est muni d'un anneau (trône) permettant de le suspendre.
Partie verso : cette partie servait de mémento et pouvait rappeler certaines conversions multiples (carré des ombres pour l'arpentage, heures légales, heures illégales...). En effet, nous nous en tenons à la mesure du temps mais un auteur arabe a recensé 1 761 problèmes pouvant être résolus avec l'instrument. Quoi qu'il en soit, la partie verso comprenait sur sa partie externe au moins deux échelles obligatoires et indispensables : une gravure en degrés permettant de déterminer la hauteur d'un astre à l'aide de l'alidade d'une part et un calendrier zodiacal qui donne chaque jour de l'année la position du Soleil dans le zodiaque.

L'alidade

Orientée vers un astre, l'alidade permet de viser une étoile en regardant au travers de ses deux pinnules. En ce qui concerne le Soleil, son orientation permet de faire passer la lumière au travers des deux pinnules (une seule position possible).

Le Tympan

Il n'est pas autre chose qu'un quadrillage du ciel qui va nous permettre de positionner un astre en fonction de sa position exacte dans le ciel et, partant de là, en ce qui nous concerne, de déterminer l'heure exacte.
Quels sont les éléments de ce quadrillage ?
A) D'abord, une projection stéréographique de la Terre en marquant ses cercles de lattitude traditionnels : tropique du cancer, équateur, tropique du capricorne.

A-1) Sphère terrestre : lignes des latitudes








A-2) Sphère terrestre : ligne des heures inégales




Toutes les lignes n'ont pas été dessinées. Elles sont au nombre de 11 et divisent donc cette partie du tympan en 12 secteurs. Les lignes marquent des heures inégales dans la mesure où elle divisent la partie claire de la journée en 12 heures qui n'ont pas la même longueur au cours de l'année.

Astrolabe 3



Sur l'image, imaginons une sphère coupée en son équateur par un plan P. Par projection stéréographique le point A sur la sphère a pour image le point a à l'intersection entre la droite SA et le plan P.


On peut voir sur l'image représentant une coupe transversale de notre sphère au niveau des pôles N et S et perpendiculaire à l'équateur. On y remarque que chaque point du cercle (disons le méridien) peut avoir une projection stéréographique sauf le point S. Bien entendu, j'emploie les mots pôles, méridien, équateur au hasard et sans arrière-pensée.... quoique...
Facile, la projection stéréographique, non ? C'est toujours facile quand d'autres l'ont inventée et qu'on ne parle pas de la mesure des angles.
La projection stéréographique a le double avantage de conserver les angles (deux courbes qui ont un angle sur S ont le même angle sur P) et de faire qu'un cercle sur S a pour image un cercle sur P.




- A défaut de connaissance de l'écrou, un axe et une cheville qui vont maintenir l'ensemble de l'instrument fermé.
L'alidade, système de visée souvent munie de deux pinnules.
- La mère (umm dans les astrolabes arabes), partie creusée dont le bord constitue le limbe et la partie creuse qui peut recevoir plusieurs Tympans. L'instrument est suspendu par un anneau (Trône de Dieu ou kursi en arabe).
- Différents tympans amovibles.
- L'araignée (ankabut en arabe)
- Une règle-Index (Ostensor), pas forcement présente sur tous les astrolabes

Astrolabe 2

Astrolabe arabe de 1208



L'astrolabe est avant tout un instrument destiné à lire l'heure solaire ou stellaire en un endroit donné, pour effectuer des observations astronomiques ou astrologiques. Quand il est destiné à être utilisé en voyage, il dispose d'un jeu de plusieurs plateaux, permettant d'ajuster la représentation du ciel local en fonction de la latitude du lieu.

L'intérêt d'une telle projection stéréographique de la voûte céleste est essentiellement pratique et esthétique : avec cette projection, tous les cercles (de hauteurs, d'azimuth,...) sont transformés en cercles, ce qui en facilite grandement le tracé, et conduit à un résultat beaucoup plus esthétique. Sans cette contrainte de réalisation, une projection centrale arbitraire pourrait être retenue.
La rete n'est qu'une armature destinée à supporter la matérialisation du zodiaque d'une part, et les pointeurs des principales étoiles d'autre part. Cette armature est souvent une véritable œuvre d'art à elle seule. Elle tend à paraître symétrique par rapport à l'axe des solstices, alors que les positions stellaires ne le sont naturellement pas.
L'astrolabe est le plus souvent dimensionné de manière à ce que le cercle du zodiaque soit pratiquement tangeant à la bordure extérieure. Les étoiles représentées sont donc restreintes à celles située au dessus du tropique du Capricorne. Sirius est donc toujours représentée, souvent Antarès, mais généralement pas Fomalhaut.
L'astrolabe a probablement été inventé par Hipparque puis décrit par Ptolémée. L'astrolabe en laiton est originaire de Perse (Iran) et amélioré dans le monde islamique. À cet égard, Sigrid ‎Hunke n’hésite pas à affirmer « Alors que les Grecs ne connaissaient que fort peu de manières ‎de s’en servir, un ouvrage d’Al-Khovaresmi [mort en 847] sur l’astrolabe en cite déjà quarante-‎trois… ».
Selon Ibn Nadim, le premier astrolabe arabe était fait par Ibrahîm Ibn Habîb Al-‎Fazâri [mort en 188 H.]‎, ‎puis des traités succédèrent à tel point qu’on peut assigner à chaque ‎astronome arabe au moins un ou deux ouvrages sur cet instrument. Le résultat est une grande ‎quantité de traités sur l’astrolabe, la plupart sous forme de manuscrits éparpillés dans les ‎bibliothèques nationales et internationales. Ces traités peuvent être réparties en deux catégories : ‎les traités de conception, d’une part, et les traités d’utilisation de l’autre. ‎
A titre d’exemple, l’Etude exhaustive des méthodes possibles pour construire l’astrolabe. ‎est un ouvrage dans lequel Al-Birûnî [362-440 H / 973-1048] « présente encore des modèles ‎servant à montrer la marche du soleil et de la lune (boîte à lune) comme aussi le mécanisme des ‎éclipses ». ‎Et après l’insertion des planches des planètes dans l’astrolabe par les astronomes ‎arabes, ils parvenaient à calculer le mouvement apparent des planètes connues, avec une ‎précision impressionnante. Ibn al-Zerqellu [1029?-1087?] trouva même le moyen de réduire ces ‎diverses planches à une seule ‘planche des sept planètes’, dont l’avers en porte quatre et le revers ‎trois, le même tracé d’épicycle servant pour toutes. La plus grande curiosité de cette ‎œuvre, selon Dominique Urvoy, est le dessin des orbites non pas circulaires mais ovoïdes ‎‎(baydi) [sic].
Nombre de chercheurs et d'historiens de la science ont cité l'idée que du matériel ‎astronomique arabe était bel et bien exporté ou importé en Occident médiéval. A cet égard, ‎Sedillot nous apprend « qu'au Moyen Age, l’instrument astronomique par excellence est ‎l’astrolabe qu’en pays d’Islam, savants ingénieux et artistes habiles perfectionnent à l’envie ».
‎Sigrid Hunke mentionne elle aussi que l’astrolabe fut chaleureusement accueilli par l’occident. ‎L'astrolabe atteint l'Europe vers 970, par l'intermédiaire du moine Gerbert d'Aurillac, qui le ramena d'Espagne, d'où il rapporta nombre de connaissances scientifiques transmises par les Arabes, qui occupaient en partie la péninsule ibérique.Pendant ‎trois siècles on se contenta de les importer. Les Musulmans, sachant combien les Chrétiens ‎recherchaient leurs articles, en fabriquaient tout spécialement pour l’exportation qu’ils ornaient ‎d’inscriptions latines.
L'auteur anglais Geoffrey Chaucer (v.1343–1400) a écrit un traité sur l'astrolabe pour son fils. Au XVe siècle, le fabricant d'instrument français Jean Fusoris (v.1365–1436) a commencé à les vendre dans son magasin à Paris, avec des cadrans solaires portatifs et d'autres instruments scientifiques populaires à cette époque.
Ce sont les portugais qui aboutissent à partir de 1485 à des progrès décisifs en adaptant l'astrolabe à la navigation maritime et en dressant des tables (regimientos) permettant de calculer la déclinaison magnétique. Le problème de la longitude ne sera résolu qu'avec l'invention du chronomètre (2e moitié du XVIIIe siècle).